Bartillat Edition
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L

ISBN : 9782841004829
Parution : 26/08/2010
Prix : 20 €
288 pages pages
Format : 12,5 x 20

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L'âme charnelle
Guy Dupré

Le journal commence en 1953 au moment où Guy Dupré entre chez Plon, l’éditeur de Barrès et de Bernanos, et publie son premier roman Les fiancées sont froides, qui lui vaudra une consécration littéraire immédiate : Mauriac, Albert Béguin, André Breton, entre autres, salueront l’arrivée de ce jeune écrivain. Il a comme amis Jean Cassou, Julien Green, Julien Gracq, Raymond Abellio et madame Simone (l’actrice Pauline Benda qui fut le dernier amour d’Alain-Fournier), croise Marguerite Yourcenar et rencontre Sunsiaré de Larcône. Le récit de ces jours se déploie en une langue incisive agrémentée de lectures et de propos rapportés. Guy Dupré relate également avec franchise et sans fard ses aventures féminines.
Le livre s’articule en fragments journaliers, autant de portraits et d’impressions qui en peu de mots cernent l’essentiel. Souvent sans concessions, parfois caustiques et crues, ces impressions livrent la face cachée d’un écrivain, ses regards décapants sur la femme, la comédie du monde et la souffrance intime.
Le journal s’interrompt en 1965 et reprend en 1974 pour se clore en 1978. Ce n’est qu’en 1980 que Guy Dupré publiera un nouveau roman, Le Grand Coucher. Ce journal comble les années de silence qui n’en constituent pas moins la genèse de l’œuvre à venir.



Guy Dupré est l'auteur de trois romans : Les fiancées sont froides, Le Grand Coucher (prix Sévigné 1980), Les Mamantes, et de deux livres de souvenirs : Les Manœuvres d'automne (prix Novembre 1990) et Comme un adieu dans une langue oubliée. Il a rassemblé ses chroniques dans Dis-moi qui tu hantes.

Présentation

Journal 1953-1978

Résumé

Le journal commence en 1953 au moment où Guy Dupré entre chez Plon, l’éditeur de Barrès et de Bernanos, et publie son premier roman Les fiancées sont froides, qui lui vaudra une consécration littéraire immédiate : Mauriac, Albert Béguin, André Breton, entre autres, salueront l’arrivée de ce jeune écrivain. Il a comme amis Jean Cassou, Julien Green, Julien Gracq, Raymond Abellio et madame Simone (l’actrice Pauline Benda qui fut le dernier amour d’Alain-Fournier), croise Marguerite Yourcenar et rencontre Sunsiaré de Larcône. Le récit de ces jours se déploie en une langue incisive agrémentée de lectures et de propos rapportés. Guy Dupré relate également avec franchise et sans fard ses aventures féminines.
Le livre s’articule en fragments journaliers, autant de portraits et d’impressions qui en peu de mots cernent l’essentiel. Souvent sans concessions, parfois caustiques et crues, ces impressions livrent la face cachée d’un écrivain, ses regards décapants sur la femme, la comédie du monde et la souffrance intime.
Le journal s’interrompt en 1965 et reprend en 1974 pour se clore en 1978. Ce n’est qu’en 1980 que Guy Dupré publiera un nouveau roman, Le Grand Coucher. Ce journal comble les années de silence qui n’en constituent pas moins la genèse de l’œuvre à venir.



Guy Dupré est l'auteur de trois romans : Les fiancées sont froides, Le Grand Coucher (prix Sévigné 1980), Les Mamantes, et de deux livres de souvenirs : Les Manœuvres d'automne (prix Novembre 1990) et Comme un adieu dans une langue oubliée. Il a rassemblé ses chroniques dans Dis-moi qui tu hantes.

Presse

Site Boojum
Duel de l’âme et du corps : Dupré au clair !
D’une femme l’autre, de l’amante à la mère, d’un auteur l’autre, de la passion à la raison : ainsi pourrait se résumer cet étonnant journal, où la vérité surgit entre les lignes, ou bien à l’orée de quelque prosodie poétique venant ponctuer le récit discontinu d’une vie à sauts et à gambades. Guy Dupré livre le contenu de son âme, et par son écriture taillée dans le silex de Char ou de Soupault, il nous fait entrevoir le double sens que revêt le mystère de la passion, celle du corps comme celle de l’esprit.
La vie elliptique
Beauté éphémère du fragment, instants capturés entre deux couloirs, au saut du lit amoureux, sur un trottoir : c’est ainsi que se déroulent les quelques années de la vie tumultueuse, du moins sur le plan des passions, de Guy Dupré, auteur rare, précieux poète en prose du roman Les fiancées sont froides. Les aphorismes abondent, ainsi que les jeux sur les mots, plutôt les créations rapportées ou originales, les hapax amusés qui en une ligne, en une périphrase résument une journée, voire un mois de vie. Quel art difficile, celui de la contraction du temps, de la réduction en un condensé proche de la maxime ou de la remarque blasée ! Loin de quelque confession insipide nourrie par on-ne-sait-quelle psychologie de comptoir, la parole de Dupré nous entraîne dans les limbes brumeuses des pensées superficielles, des pensées de surface, nous laissant entrevoir tout un monde lointain, eût dit le poète. Entre Cioran et Nietzsche parfois, se glisse la crudité (souvent cocasse, voire ludique, comique !) de l’instant post coitum, voire in coitum, et l’animal n’est pas toujours triste, bien que l’auteur dans le laps important de temps qu’il dissimule, de 1965 à 1974, laisse affleurer dans son verbe les désillusions que peut apporter la lente érosion du désir, le tassement subtil des élans du corps. Le journal de Dupré est constitué d’ilôts, de récifs qui pointent le bout de leur corail à la surface d’une vie de bureau, de maison d’édition, de livres, de réceptions, de repas mondains. Et la syntaxe elle-même laisse la place à un style tantôt télégraphique, non verbal, simple transcription, plutôt incarnation, de l’impossibilité que l’on éprouve à fixer un souvenir : Dupré ne ment pas, il laisse entendre que le récit de nos vies ne peut être que parcellaire, constellation où les mots nous manquent, où la mémoire se joue de nous, sélectionne, réduit, corrige et transforme, tout en laissant à la fraîcheur de l’instant sa vibrante fragrance, celle des jours anciens qui se sont tus. Il en va ainsi de ce style proprement vital, celui qui autorise l’effacement de l’inutile, la parole automatique, le jaillissement temporaire d’une lumière qui se décolore.
Des femmes, des hommes et des livres
Les amours de l’écrivain sont nombreuses, ses conquêtes rapides, consommées au début du journal avec un appétit certain, qui se raréfient, ou du moins se subliment, tantôt dans le fantasme, dans l’inachèvement (avec Pauline, l’amante de Fournier), tantôt dans l’amour adultère qui perdure, mais aussi dans l’amour qui s’accomplit par le mariage avec Thérèse, sans oublier la déception de Sophie. Ces noms, qui se résument parfois à une simple initiale, sonnent comme la litanie, presque la liturgie, des mouvements contradictoires de l’âme de l’auteur. On se plaît à suivre, non, à deviner, le devenir de ces histoires à tiroirs, de ces scènes presque issues de Feydeau (notamment l’histoire de Wanda et de son mari très conciliant !) ; sorte d’éducation sentimentale où le héros se fût compromis dans la demande et dans le plaisir charnel sans les atermoiements de son cœur transi ! Et pourtant, on peut aussi dire de Dupré : « Il voyagea ». Voyages de l’âme au pays des femmes, voyages du corps dans les contrées guerrières du « péché de l’un sur l’autre » comme le narrait plaisamment Marot. Mais le journal nous permet aussi de rencontrer dans leur intimité parfois troublante des personnalités illustres : de Cocteau à Colette, en passant par Breton, Arletty, Mauriac, Sunsarié, Gracq, Green et tant d’autres. N’oublions pas les livres lus, ces auteurs qui ont fait la vie de Dupré, comme Maurras (dont il nous raconte à plusieurs reprises les « difficultés » qu’il avait au moment de passer à l’acte avec ces dames !), Barrès, Péguy (le titre du journal est tiré d’un Dialogue de Péguy, de l’histoire et de l’âme charnelle). Au détour d’une page, l’auteur nous livre ses commentaires, soit diserts, soit sur le mode à la Montaigne, sans liaison, juste au gré de l’inspiration que lui procure cette intime proximité qu’il entretient avec ses auteurs. La diversité, la multiplicité des hommes, permet à Dupré de passer d’un discours poétique à une histoire de coucherie, d’une rencontre mondaine avec quelque auteur en vue à son expérience terriblement fascinante, et d’une familiarité plus effroyable qu’étrange, celle que nous vivons tous, l’expérience de la réalité qui nous pousse à nous soucier du repas de demain, des chaussures que l’on va porter, ou de l’émission minable de télévision que l’on a regardée : le réalisme ne naît pas de l’exhaustivité du détail, mais de l’utilisation percutante du rappel à l’ordre, c’est-à-dire du rappel au réel.
Magna Mater
Et le journal progressivement se transfigure en un chemin de croix, celui du deuil. Ce deuil, c’est celui de Marthe, la mère aimée ou pas, qu’importe, Dupré nous fait sentir avec une émotion qui se construit comme un véritable crescendo, le dépassement que l’enfant fait accomplir au simple constat, sans doute trop terrestre, de l’amour filial ou maternel. Il écrit : « les deux » , et là encore, comment ne pas songer au « parce que c’était lui, parce que c’était moi » de Montaigne ? Evidence d’un lien qui transcende la chair, qui justement nous amène vers cette âme, cette quête de l’apaisement, qu’elle transparût dans le verbe du livre ou dans la parole quotidienne de l’homme. Anecdotes cocasses de la mère, le rôle qu’elle tient, ses habitudes, distillées avec parcimonie, du temps où elle a encore toutes ses capacités ; et puis, spectacle du navire qui sombre, de l’esprit qui s’éteint, ou qui s’allume seulement par intermittence, jusqu’à la disparition ; mais ce n’est que celle du corps, de la chair, cette chair qui est réévaluée par l’auteur dans ces pages où la douleur elle-même finit par être inhumée dans la terre des souvenirs. Dupré se livre à une quasi-analyse, que n’eussent point renié les psychologues freudiens, nourrie non pas de formules, mais de retours, de relectures, d’émois frémissants : voilà l’auteur vénérable qui se souvient, qui accède au temps retrouvé de la communion, du partage. La scène primitive de la mère qui engendre est conquise par une Cène de l’esprit, un repas enfin consommé, celui de l’acceptation, de la vérité perdue et connue à nouveau, et l’auteur dans ses rêves et ses larmes dessine le portrait de la mère qu’il ne peut révéler vraiment que par-delà son passage terrestre.
C’est la leçon de ce journal : de l’oxymoron du titre naît « la perpétuation du supplice », que Lautréamont nous accorde cet emprunt, le conflit éternel de l’os et de la cendre, le pli prêt à rompre, celui du désir du siècle et du désir du ciel. Guy Dupré nous entraîne dans une sarabande souvent très drôle, non pas cynique, non pas véritablement blasée, mais plutôt détachée de la rudesse des sens, sans doute par le biais de la sage expérience de l’écrivain chenu. Et les plus grandes beautés de son journal résident dans la totale adéquation de l’écriture au sujet même de cette entreprise de collection de souvenirs : si le fil de la vie nous mène sur le chemin de la découverte spirituelle, n’est-il pas normal de conserver pour soi quelque mystère, quelque irréductible obscurité, comme cette quasi-décennie occultée, comme ce silence sur l’absence de production de Dupré durant de nombreuses années ? C’est au prix de l’absence, c’est à la faveur du silence que dans ce livre de vie jaillit la lumière de l’esprit.
Romain Estorc



Livres pour vous
(Fabrice de Rotrou)
Bon, je ne suis sans doute pas cultivé car j’ignorais l’œuvre de Guy Dupré. A la suite d’une lecture d’une chronique dans Le Figaro Littéraire, j’ai lu L’âme charnelle.

Voilà une découverte, une vie qui se raconte entre les lignes d’un journal. Une œuvre aussi qui balbutie, hésite et se construit indépendamment.

Ce journal n’est absolument pas ennuyeux, bien au contraire. D’abord, on y croise des figures célèbres, Gracq, Cocteau, Yourcenar, Obaldia, Robbe-Grillet, Proust, Mauriac, etc… même mon cher Déon. Et bien sûr, Pauline Benda, le dernier amour d'Alain-Fournier.

Puis on y lit la vie amoureuse de Dupré, une existence scintillante, fluctuante, méritante.

L’émoi pour l’un de ses camarades de classe (p.46), toutes les femmes qu’il a aimées ou conquises, jusqu’à Thérèse sa femme légitime.

On ne peut s’empêcher de corner les pages.

Voici 3 extraits :

« Journées blanches que je laisse s’échapper comme les jetons d’un appareil téléphonique déréglé : plus d’appels ni de voix. »

« Du calme. Ne pas m’horripiler. Continuer à coudre quand il y a un nœud. Chaque chapitre doit être capté, pris au piège des mots, enserré peu à peu. Tout est une question de patience et de ruse amoureuse. Ne plus patauger dans ces flaques d’eau de femme où se dilue ma liqueur d’homme. »

« Accoupler le dehors et le dedans et enfiler les espaces intérieurs comme les perles de la même eau. »

Il y a aussi les pages sur la mort de sa mère et son enterrement qui serrent le cœur, procurant une vive émotion.

L’écriture est gracieuse, une petite musique concertante, tantôt sonate, tantôt symphonique.

Ça se joue toujours au bord du précipice, comme toute vie.

Fabrice de Rotrou





Revue Arès (Thomas Dreneau)
L’âme charnelle. Journal 1953-1978 de Guy Dupré (Bartillat, 2010)

Que s’est-il donc passé entre la sortie du premier livre de Guy Dupré, Les fiancées sont froides (1953) et Le grand coucher (1980)? Qu’arrive-t-il à un jeune auteur salué, dès le départ, par François Mauriac pour ce livre qui reste l’un des grands romans de l’après-guerre? Les fiancées sont froides sont sans conteste le roman de Guy Dupré en 1953 ; à tel point que l’on peut comprendre le long espace de temps qui sépare ce dernier du Grand coucher.

Car, avant l’écriture, c’est la vie qui importe. D’autant que ce journal de Guy Dupré témoigne de toute cette période de l’existence d’un homme partagée approximativement en deux temps : tout d’abord, le jeune Guy Dupré qui, juste après la publication des Fiancées sont froides, connaît une certaine reconnaissance de la part de ses pairs, en même temps qu’il mène une vie sentimentale mouvementée parmi ses nombreuses maîtresses ; ensuite, cet autre moment précédant, quant à lui, Le grand coucher, et marqué notamment par la mort de sa mère dont on garde l’impression manifeste qu’elle est la grande inspiratrice de ses débuts en tant qu’écrivain.

En somme, Guy Dupré cherche, par ce journal (L’âme charnelle), à combler un vide littéraire, mais, paradoxalement, il cherche aussi à transcender ce que l’on peut considérer comme une illusion, une chimère, en nous proposant un « document », soit un texte qui voisine au plus près de la réalité. L’auteur ne tente point de faire une œuvre d’art à l’instar de Léon Bloy qui, par son journal, révèle une véritable ambition « métaphysique » dans l’attente du jugement dernier. Non, Guy Dupré est trop honnête pour cela, et n’a pas, semble-t-il, destiné son propre journal à devenir une œuvre comme Les fiancés sont froides, par exemple. Mais il reste que ce livre, par son aspect brut et surtout par la volonté implicite de l’auteur de ne pas trop le retoucher afin de garantir au mieux son authenticité, prétend finalement à une vérité qui n’est pas la vraisemblance telle que la veut toute littérature fictionnelle.

Cette vérité est, au fond, le génie d’un homme qui le rattache aussi bien à son premier livre qu’au réel qui l’entoure. Ainsi, l’on perçoit parfaitement la personnalité de Guy Dupré au travers de ce journal. Il y a chez lui ce besoin d’admirer qu’il s’agisse de Maurice Barrès dont il a eu la chance de côtoyer le fils, Philippe, ou encore qu’il s’agisse d’Alain-Fournier à partir du contact providentiel de Pauline Benda, l’ex-muse de l’auteur du Grand Meaulnes. Cette dernière, grâce à différentes rencontres rapportées par le diariste, rappelle l’être féminin en général dans Les fiancées sont froides, et, par conséquent, le rapport complexe de Dupré vis-à-vis de celui-ci ; de telle sorte que, comme dans ce premier livre, il est question de la femme et de la mort.

En clair, Guy Dupré revient à la littérature là où l’on ne semblait pas l’attendre. La mort de Marthe, sa mère, est un événement tragique qui scande l’art de Guy Dupré. Elle nous permet, par-delà ce lien entre le réel et l’imaginaire, de comprendre ce qui définit le style d’un homme. L’écrivain souhaite retracer le vécu intuitif, tâche en elle-même désespérée, mais indispensable si l’on songe à ce qui nous permet, ce qui nous oblige à exister.

Thomas Dreneau

 

Valeurs actuelles le 13 janvier 2011

Les mystères levés de Guy Dupré





Pourquoi un écrivain, au lieu d’allonger la liste de ses oeuvres complètes, et donc de produire un livre tous les ans ou tous les deux ans, sans même parler de l’effrayante fécondité d’un Simenon, dont le rythme était quasi celui de la presse trimestrielle, observe-t-il un silence obstiné ?

Et que fait-il donc de son temps libre, ce mauvais élève ? Grâce à la parution de l’Âme charnelle, de Guy Dupré, un pan du mystère est levé.

Entre la sortie de son premier roman, Les fiancées sont froides (1953) et celle de son deuxième, le Grand Coucher (1981), un peu plus d’un quart de siècle s’écoula. Autant dire une éternité. Et d’autant moins compréhensible que l’entrée en littérature de l’auteur de 24 ans avait été saluée par une critique dithyrambique et les applaudissements de quelques ténors, dont André Breton, Julien Gracq, François Mauriac… N’importe quel littérateur se serait empressé d’enfoncer le clou, sous les encouragements répétés de son éditeur. Faut-il incriminer la “détestable” influence de Julien Gracq dont le rude pamphlet, la Littérature à l’estomac, avait secoué le cocotier littéraire en ces années-là ?

L’auteur, interrogé naguère par notre ami Michel Mourlet, n’avait pas fait mystère des raisons de son mutisme. Alors éditeur lui-même chez Plon, “Mère Lachaise” de la profession, il en avait tiré une certaine répulsion de la chose écrite. Ne voulant pas devenir une “main à plume” parmi tant d’autres, il préféra prêter l’oreille à ses voix et laisser infuser les livres à venir. Mais que diable avait-il bien pu faire de ses divins loisirs durant toutes ces années ?

Le journal, tenu par Guy Dupré entre 1953 et 1978, que publient les éditions Bartillat sous le titre l’Âme charnelle dévoile une partie du mystère. Ce n’est pas un journal continu et abondant comme ceux de certains diaristes impénitents, et l’on pense, bien sûr, à Julien Green, de qui l’auteur reçut de louangeuses appréciations à ses débuts. Non, plutôt des fragments, en général assez brefs, qui fixent des sensations, des moments privilégiés, des impressions de lecture, et, parfois, livrent de précieuses informations sur le processus créateur d’un écrivain et son “work in progress”.

Avec le décalage entre l’écriture et la publication de l’Âme charnelle, nous frappe la dégradation de la vie littéraire des années cinquante à nos jours. En ces temps lointains, les écrivains ne se faisaient pas reluire sur leurs blogs, ne “chattaient” pas sur Internet, ne s’admiraient pas sur Facebook et ne faisaient pas des pieds et des mains pour passer dans une émission de télévision. Ils fréquentaient les colloques de Royaumont, les “coquetèles” de Gallimard ou Grasset, et, souvent, sans esprit de rivalité, se divertissaient ensemble. Ainsi de Guy Dupré avec René de Obaldia, Philippe Sollers, André Fraigneau, Raymond Abellio, ou même François Mauriac qui, perfide, s’enquérait auprès de l’auteur des Fiancées sont froides : « Vos fiancées se sont-elles réchauffées ? ». Auprès des vieilles dames indignes et célèbres, beautés “septembrisées”, dont il aimait recueillir les confidences, les jeunes personnes tiennent une grande place dans le journal de Guy Dupré, tissé de chassés-croisés sentimentaux et semé de confidences parfois crues. Jusqu’à ce que survienne la femme ultime qui mettra fin au donjuanisme panique de l’écrivain. Cependant, l’Âme charnelle n’est pas seulement un mémorial amoureux et sensuel ; mais aussi et surtout une plongée dans l’inconscient et les arcanes de la création d’un auteur rare qui choisit de s’ensevelir vivant pour mieux renaître à son heure.

L’Âme charnelle, de Guy Dupré, Bartillat, 288 pages, 20 euros


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Actualités de l'ouvrage

- Rencontre avec Guy Dupré le 8 novembre à la Maison des écrivains, 2010

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